Illustration originale de Alex Formika – Tous droits réservés
Talleyrand aurait dit un jour : «La parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée ». Aurait-il laissé un post sur son blog ou un tweet pour qu’on soit certain qu’il est bien à l’origine de cette sentence ? Nul ne sait.
M’sieur Talleyrand, si vous êtes connecté, sachez que je ne suis pas tout à fait en phase avec votre affirmation. Je pense voyez-vous qu’il y a une interaction beaucoup plus complexe entre langage et pensée… à tel point que, vous comme moi, sommes en fait incapables de penser correctement quelque chose d’informulable. C’est de la vraie interaction, croyez-moi, M’sieur Talleyrand. Un discours perverti peut même finir par infecter notre pensée malgré nous. Nos phrases toutes faites, agrippées à nos clichés bien pensants peuvent contaminer nos dernières poches d’esprit critique.
A l’heure où je vous parle, la langue de bois a peut-être envahi une bonne partie de notre pensée collective et on n’a rien senti. A l’heure du brouhaha permanent, de l’hypermédiatisation et de la mise en ligne bavarde de notre propre existence individuelle, le concept même de langue de bois s’est peut-être dissipé, tellement il s’est bien immiscé partout… tant la manipulation langagière semble être devenue un mode privilégié d’interaction. Comment séparer la parole qui enfume de celle qui éclaire ? Comment distinguer l’authentique transmission de pensée du boniment bidon à esbroufe élaborée ? Comme il n’y a toujours pas de logiciel conçu à cet effet, on peut encore se laisser abuser par l’éclat de l’encaustique et le cirage de pompe.
Au final, ce sont encore mes actes qui en disent plus sur ma vérité que mon verbiage. Néanmoins, mes paroles n’ont pas fini d’en dire long… sur ce que je souhaiterais qu’on pense de moi.