Si j’avais été une musique, j’aurais aimé être un titre de The Divine Comedy, une sonate de Scarlatti ou un morceau de Ludovico Einaudi… la terminaison en i n’étant ici que pure coïncidence. Hier soir au Grand Rex, j’étais donc pour ainsi dire plongée en moi-même, lors du concert de votre tournée « In a time lapse ». Vous étiez là, au piano, en compagnie d’une dizaine de musiciens (violonistes, violoncellistes, percussionnistes, guitaristes…), plongés ensemble dans une troublante semi-obscurité.
Il y a dans vos compositions Monsieur Ludovico Einaudi une forme de mélancolie particulière qui se laisse toujours rattraper par l’urgence. L’urgence de vivre malgré tout pour faire parler son destin ? Instants volés mais figés, aussi fugaces en réalité qu’éternellement vivants quelque part. Quelques notes qui suggèrent les dilemmes de la condition humaine moins maladroitement que de trop longs paragraphes… Des mélodies minimalistes comme nos pulsions de vie, répétitives comme nos obsessions ou nos faiblesses. Il n’y a pas à dire : mon clavier azerty est un peu jaloux des 88 touches du vôtre, Monsieur Einaudi. Ce concert à guichet fermé nous a plongés dans une vague continue. Vu la pénombre entretenue, étions-nous dans la caverne de nos états d’âme ? C’était parfait, car les smartphones étaient ridiculement handicapés pour capter quoi que ce soit de cette beauté instantanée.
Les arrangements pour la scène ont magnifié vos plus grands morceaux en nous les faisant redécouvrir. Les applaudissements en standing ovation d’un public acquis ont accompagné le « bœuf » final telles des percussions improvisées. Cette clôture a achevé de souligner le luxe suprême qui est le vôtre : brouiller les pistes entre exigence classique, audace contemporaine, virtuosités jazz et recherche électro…
Maintenant, je peux vous le dire, une fois remise de mes émotions : merci Monsieur Einaudi pour cette brèche magnifique que vous avez ouverte dans le déferlement constant de médiocrité qui est le nôtre.
Rebonds : le site en italien de Ludovico Einaudi et sa page Wikipedia