De la même façon que le monde est plein de plats que nous n’avons jamais goûtés, les langues étrangères sont riches de mots sans équivalent dans celle de Molière. Heureusement, il y a maintenant le TSUN-DICO, sous-titré en toute clarté : « 200 mots que le français devrait emprunter aux autres langues». Pour voyager avec le sourire, sans passer aucun portique d’aéroport.
Des mots nouveaux à picorer
J’ai ma petite collection de livres spécialisés dans les néologismes et autres mots valises. J’en raffole et j’en commets parfois. Voici un livre cousin : il n’invente rien, mais son autrice a glané aux quatre coins du monde des mots qui comblent des vides pour nos oreilles francophones. Je vais le glisser sur le plateau inférieur de la table basse pour y picorer régulièrement. Entre deux noix de cajou et une tartine de tapenade, on grignotera avec plaisir le mot tsundoku qui, pour les lecteurs japonais, désigne « l’accumulation en piles de livres qui ne sont jamais lus » ou le pana po’o hawaïen qui résume enfin cette « façon de se gratter la tête pour mieux se rappeler quelque chose ». À moins que vous lanciez à l’apéritif, mais sans viser personne, le terme indonésien jayus, une « blague tellement pathétique qu’il vaut mieux en rire »…
Le mot fortifie l’idée
Classés par ordre alphabétique plutôt que par fuseau horaire, les 200 mots du TSUN-DICO de Sabine Duhamel savent établir avec nous une subtile complicité, en faisant du monde entier une bien belle prairie lexicale. Alors comme ça, dans d’autres langues, des terriens ont déjà trouvé un mot précis pour exprimer ce que nous mettons 15 mots à exprimer en français ? Détail du quotidien, émotion fugace ou habitude cocasse… avec un mot qui cerne enfin la chose, l’idée est mieux saisie. Plus on a de mots à sa disposition, plus on peut établir de nuances intellectuelles… et de passerelles poétiques entre les phrases.
Le TSUN-DICO de Sabine Duhamel qui parait aux Éditions Autrement jouit également d’une mise en page fort agréable, ponctuée d’illustrations de Gustave Auguste agrémentant habilement notre voyage lexico-exotique. De quoi vous donner une soudaine wanderlust, à découvrir page 110… à moins que votre générosité familiale vous pousse à offrir un TSUN-DICO à vos besan croisés page 14. Dans ce cas, vous avez bien de la chance d’avoir sympathisé avec eux et vous avez de fortes probabilités d’avoir entre 45 et 55 ans… Nul n’est parfait, surtout le temps passant.
REBONDS
- Mais d’où viennent nos nouveaux mots ? Le point complet 2019 avec les merveilleux Décodeurs du journal Le Monde…
- Les emprunts pays par pays, classés par l’Académie Française. S’il vous plaît.
