Feuilles de lotus

Robert Wright, Le Bouddhisme a raison et c'est scientifiquement prouvé, méditation pleine conscience, psychologie évolutionnisteAdeptes du yoga en quête uniquement des bonnes postures, passez votre chemin. Avec « Le Bouddhisme a raison et c’est scientifiquement prouvé », best-seller traduit en 25 langues, le spécialiste des sciences cognitives Robert Wright, n’a pas écrit un manuel mais abordé la méditation en sceptique. C’est ce qui fait le sel de l’affaire. Avec son enquête scientifique enrichie en pépites d’humour sur la nature humaine, il nous emmène très loin sans bouger de notre coussin…

Assieds-toi et sors donc de la Matrice

Psychologue, Robert Wright anime des séminaires à Princeton sur le bouddhisme, la méditation et les sciences cognitives. Il ne s’intéresse pas véritablement aux aspects religieux. Ce qui le passionne dans la méditation, c’est ce que le cerveau en fait. Ça démarre à la vitesse de la lumière avec la scène mythique du film Matrix où le héros Néo découvre qu’il vit dans un monde virtuel rêvé, une prison algorithmique appelée la Matrice. Orpheus, le mentor des rebelles qui le contactent, lui demande de faire un choix cornélien : avaler la pilule bleue et retourner tranquillou dans son univers artificiel ou prendre la pilule rouge et briser le voile de l’illusion pour vivre dans le réel. Bien sûr, notre Néo est un héros : il avale la pilule rouge et tout commence… Pour les adeptes du bouddhisme occidental et Robert Wright, avaler la pilule rouge ressemble bel et bien à la méditation de pleine conscience… mais sans Keanu Reeves. Il s’agit de sortir des conditionnements narcissiques et des illusions que notre cerveau biologique reproduit sous l’emprise de… la sélection naturelle !

Darwin en embuscade dans notre cerveau

Pour Robert Wright, c’est l’occasion de nous faire découvrir les apports de la psychologie évolutionniste. Celle-ci analyse comment le cerveau a été programmé au fil de notre évolution pour favoriser une seule et même opération : la survie et la transmission des bons gènes à la génération suivante. Manger, faire l’amour, obtenir l’estime des autres et l’emporter sur nos rivaux : voilà des actes hautement télécommandés par la sélection naturelle, sans que nous en soyons conscients. Méditer et prendre de la distance avec nos conditionnements et nos émotions nous amène à déprogrammer les mécanismes ciselés par l’évolution mais qui ne sont plus tous adaptés à nos conditions de vie modernes. Apprendre à ne plus s’identifier à ses pensées, prendre de la distance avec nos émotions négatives et les histoires que nous nous racontons en permanence sur les choses et les gens, comprendre les variables du contexte qui orientent nos jugements à notre insu… c’est tout l’apport de la méditation en pleine conscience.

David Hume déjà sur le tatami

Sur ce chemin éthique et libérateur, la philosophie n’est jamais loin. On peut la croiser à chaque chapitre, et tout particulièrement dans le neuvième en la personne de David Hume, philosophe écossais du XVIIIe S. Ce cher David pensait déjà à son époque, qu’on se racontait bien des histoires cartésiennes, mais qu’au final, la raison était « esclave des passions », passion étant à prendre dans le sens large de « sentiment ». Une approche assez orientale qui coïncide avec l’époque à laquelle les idées bouddhistes commencent à prendre le bateau pour gagner l’Occident. David Hume explique en effet que le « moi » n’existe pas, tout en considérant que le contrôle de soi est tout à fait possible, grâce à ce qu’il appelle les passions calmes. Bouddha et Hume, même combat ?

Dans Le Bouddhisme a raison, Robert Wright nous offre en fait un autre point de vue sur les choses qui partent de notre nombril. Si nombre de méditants s’assoient en tailleur pour simplement soigner leur stress et repartir plus heureux, Robert Wright nous ouvre une autre voie. Elle lui a suggéré que cette pratique amène finalement à adopter le « point de vue de nulle part », celui qui s’oppose au culte de la singularité individuelle. Il voit dans les graines de lotus, les germes d’une révolution qu’il appelle « métacognitive ». Elle pourrait tout changer si un nombre croissant d’humains se mettaient à comprendre que l’ego est bien peu de choses… quand notre écosystème part en sucette. Comme quoi, chercher l’Éveil en soi nous ramène paradoxalement à notre façon de cohabiter tous ensemble. Merci Matrix. Merci Robert. Merci Bouddha. Merci la vie.

REBONDS

Feuilleter le livre sur le site Flammarion…

Suivre en ligne le séminaire de Princeton de Robert Wright (MOOC)

 

 

2 réflexions sur “Feuilles de lotus

  1. Allez hop ! Pilule rouge et Robin Wright pour tout le monde. Krishnamurti avait noté que l’ego est à la source de tous nos maux. Merci chère Hemmapil pour ce partage.

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