Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais il suffit qu’on me dise « Sois spontanée et naturelle » pour que tout à coup, un indélicat parfum d’injonction paradoxale se dégage dans la pièce. On ne peut être spontané que si personne ne nous a rien demandé. De la même façon, je me demande vraiment si on peut être inspiré… sur commande ?

Mais au fait, c’est quoi l’inspiration ?

En pleine suspicion de paradoxe, soyons donc méthodiques au pays des muses. Allons d’abord pêcher la définition. Larousse.fr nous dit ceci : On s’aperçoit donc qu’en ce qui concerne l’inspiration, deux canaux sont possibles. On peut la chercher en soi comme une impulsion ou un feu follet qui s’amuse à vous échapper quand vous croyez la contrôler. On peut aussi l’espérer comme une intervention extérieure venant d’une source mystico-invisible : Dieu, muse, ange-gardien, esprit bienveillant, etc.  Donc, dedans ou dehors ? D’emblée, cette chose, on ne sait jamais où on l’a rangée : voilà qui ne facilite pas les choses. Dans un cas comme dans l’autre, cela peut se terminer par une banale sauce tomate sur les fusilli si l’inspiration a décidé d’aller crécher ailleurs. Je vais vous faire un aveu fondé sur mon humble expérience personnelle : s’en remettre à l’inspiration, il n’y a finalement rien de plus bloquant. C’est un tremplin à excuses.

On se jette à l’eau… comme les pâtes !

Quand je cherche une idée, dans mon travail ou pour tout autre chose du ressort de l’écriture ou de la vie privée, je n’attends pas d’être inspirée comme on attend Godot. Je me lance et on voit ce qui se passe. La première idée en amène une autre et ainsi de suite. Comme le disait le philosophe Alain dans une phrase que je ne cesse de rabâcher à mon entourage (je vous assure, je ne les envie pas) : « Le secret de l’action, c’est de commencer ». Oui, voilà le mantra, ma chère Alexandra. L’eau est fraîche, mais il faut bien se lancer, car à force d’hésiter et de trouver des excuses, les conditions ne seront jamais réunies pour avancer…

Est-ce que tout le monde peut avoir des idées géniales, révolutionner la cuisine, participer au concours Lépine ou inventer des histoires ? Peut-être ou peut-être pas. En développement personnel ou en management, on dispose d’une littérature assez pléthorique pour nous indiquer des exercices de musculation pour l’imagination… plus ou moins convaincants. C’est un vrai marché et cela marche effectivement très bien comme secteur de l’édition. J’ai peur néanmoins que le processus d’idéation ne soit ni égalitaire, ni méritocratique, mais plutôt… profondément injuste et aléatoire.

La créativité ou rien ?

« Soyez inspirés » est en fait l’oxymore emblématique d’une grande injonction contemporaine qui s’infiltre partout : vous devez être épanoui, singulièrement innovant et forcément créatif. Devant l’automatisation progressive de nombreuses fonctions professionnelles non-créatives, toutes les personnes qui se sentent dépourvues de créativité peuvent ressentir une vague sensation d’insignifiance… teintée d’appréhension quant au grand remplacement par les robots. Tous ceux qui veulent juste faire les meilleures carbonara du monde, sans réinventer la crème fraîche, se retrouveront-ils un jour sur le bord de la route l’évier ?

DES IDÉES POUR ALLER PLUS LOIN…

>D’où viennent les idées ?

>« Pourquoi Sony n’a pas inventé l’iPod ? »  : une passionnante interview de Luc de Brabandere sur le brainstorming…

>euh… puisque vous insistez : des recettes de pâtes !