Un philosophe à l’hôpital ?

Un philosophe à l’hôpital Livre de Guillaume Durand Flammarion

Attention, derrière ce titre un peu à double-sens, ne se cache pas un philosophe souffrant, mais plutôt une nouvelle mission. Il n’est donc rien arrivé de grave à son auteur-philosophe, Guillaume Durand. Dans les couloirs de l’hôpital, on sait tous que c’est la science qui a fait de notre espérance de vie ce qu’elle est aujourd’hui. Mais parfois, des choix de santé soulèvent des questions plus éthiques que médicales et Dame La Science se retire sur la pointe des pieds. Certains médecins peuvent alors faire appel à Guillaume Durand pour aider patients et familles à orienter leurs décisions. Guillaume Durand n’est pas un sage avec une longue barbe qui lit l’avenir, le bon et le bien dans les IRM. Que nenni. Il est maître de conférences en philosophie à Nantes, et spécialiste en éthique médicale et bioéthique. Pour être au cœur de ce dont il parle, il dirige aussi la consultation d’éthique clinique au Centre Hospitalier de Saint-Nazaire.

Un pas de côté pour nourrir la liberté de choix

Dans son livre Un philosophe à l’hôpital qui vient de paraître chez Flammarion, Guillaume Durand raconte à chaque chapitre un nouveau dilemme médical et comment il essaie de guider au mieux les patients pour trouver l’attitude qui fera sens pour eux et qui respectera leur liberté. Avec lui, nous croisons de futurs parents confrontés au handicap physique lourd du fœtus pouvant justifier une interruption médicale de grossesse, une jeune fille qui souhaite une ligature des trompes pour raison « écologique », une femme qui panique à la lecture de son décryptage ADN commandé en douce sur Internet ou un détenu diabétique qui refuse l’insulinothérapie pour ne pas paraître « faible » aux yeux des autres prisonniers… 13 histoires qui nuancent nos certitudes. 13 histoires sans pathos ni complaisance, mais qui nous confrontent aussi très concrètement à ces fameux enjeux bioéthiques très clivants de notre société.

A l’hôpital, moins de morale, plus d’éthique

Même si le livre ne foisonne pas de références aux grands philosophes, on y voit l’influence de penseurs à l’éthique minimaliste comme l’utilitariste John Stuart Mill ou le libéral Ruwen Ogien qui résumait sa morale par « Ne pas nuire aux autres, rien de plus. »

La force de la réflexion et du témoignage de Guillaume Durand dans Un philosophe à l’hôpital, c’est de montrer comment la philosophie gagne plus que jamais à s’intégrer à la vie de la cité et à se « cogner » au réel comme si Socrate s’invitait en consultation. La demande de réflexion philosophique grandit et la philosophie peut frayer avec bien des disciplines. Pour le plus grand bien des patients qui savent que soigner, c’est bien plus que prescrire le bon antalgique. La très médiatique Cynthia Fleury a déjà fait entrer la philosophie à l’hôpital. Gabrielle Halpern veut aussi montrer combien l’hybridation de la société va devenir nécessaire : une bonne façon d’associer les disciplines pour sortir des querelles de chapelles et affronter avec créativité la complexité de notre monde. On le sent : les « philosophes » descendent plus volontiers dans l’arène et passionnent de plus en plus de « non-philosophes ». Un principe actif qui ne peut avoir que des effets désirables.

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